Category: Supply chain & Distribution

PAIEMENT MOBILE: LA CHINE DEPLOIE SES TENTACULES

Le cash, en voie de disparition ? La Chine ne semble pas échapper pas à la règle. Au contraire. Elle a même une sacrée longueur d’avance sur les pays occidentaux. Si ces derniers affectionnent encore les règlements par carte de crédit/débit, les Chinois ont sauté cette case pour passer directement au paiement mobile. Et ce en seulement cinq ans.

Payer avec son smartphone en scannant un code QR, un type de code-barres en deux dimensions, dans une boutique, un restaurant ou même devant l’étal d’un vendeur ambulant, est devenu un geste banal de tous les jours. Le montant de la transaction est aussitôt débité du compte client pour créditer celui du commerçant. Facile, rapide et pratique, ce moyen de paiement intégralement dématérialisé permet de réaliser tous ses achats quotidiens, sans un yuan en poche. « Je paye tout avec mon téléphone : le taxi, les courses, l’essence, les factures, les frais de scolarité de ma fille ou pour effectuer des virements », explique Wang Xiaofeng, une Pékinoise de 42 ans.

Son mari français, David, a longuement hésité. « C’était plus compliqué pour les étrangers de relier leur carte bancaire aux applications de paiement mobile. Je ne faisais pas d’achat en ligne et n’en ressentais pas le besoin. C’est petit à petit que c’est venu, dans mon quotidien. Je m’y suis mis il y a 2 ans », se souvient-il. Une décision qu’il ne regrette pas : « C’est pratique. Il y a plein de promotions ». Et d’ajouter : « Depuis 3 semaines, je n’ai plus d’argent liquide sur moi ».

Le monopole de deux géants chinois

Comme les quelque autre 650 millions adeptes du portefeuille électronique, Wang Xiaofeng utilise indifféremment les applications Alipay, WeChat Pay ou Tenpay et, occasionnellement, le concurrent américain Applepay. Alipay, qui appartient au géant du commerce en ligne Alibaba et WeChat Pay, la solution de paiement intégrée à la messagerie WeChat, elle-même exploitée par le leader des réseaux sociaux chinois Tencent, se partagent 170 millions de transactions quotidiennes. Ce qui représentait 5,5 trillions de dollars en termes de volume de paiement par téléphone portable en Chine en 2016. Alipay et WeChat Pay détiennent à eux seuls 92 % du marché du paiement mobile.

Et entre les deux géants chinois, la guerre est sans merci. Distancé quelque peu par son concurrent, WeChat a réalisé un coup de maître. Juste avant le Nouvel An chinois 2014, le groupe a librement détourné la tradition pluriséculaire qui veut que durant cette fête la famille et les proches reçoivent en main propre des enveloppes rouges (hongbao) remplies de billets. Les consommateurs chinois ont ainsi pu envoyer leurs étrennes via leur téléphone portable. Durant le Nouvel An chinois 2016, WeChat a permis l’envoi de plus de 8 milliards d’enveloppes rouges virtuelles – soit 10 enveloppes en moyenne par utilisateur – contre 1 milliard en 2015 et seulement 16 millions en 2014.

S’étendre aux États-Unis et en Europe

Outre la Chine, les deux colosses comptent également étendre leur influence aux États-Unis et en Europe. En commençant par les touristes chinois, qui peuvent déjà régler leurs achats chez certains commerçants en France via leur portable depuis novembre 2016. Et ce grâce aux partenariats établis par Alipay, dont le producteur de logiciels et terminaux de paiement Ingenico ou les banques BNP Paribas et Edel. La France n’a d’ailleurs pas été choisie par hasard. Les touristes chinois (2,2 millions en 2015 et 1,6 million en 2016) y dépensent en moyenne 9 milliards d’euros par an, soit la moitié de ce qu’ils dépensent au total en Europe, d’après l’agence de développement touristique Atout France.

Même ambition aux États-Unis. En février 2017, WeChat Pay s’est associé à la start-up américaine Citcon pour l’implanter dans 200 emplacements, dont le Caesars Palace de Las Vegas. En mai, Alipay a officialisé son partenariat avec First Data Corp, un processeur de paiement coté à New York. Alipay pourra être ainsi utilisé dans 500 000 magasins à travers les États-Unis puis à terme, dans 4 millions de boutiques.

L’avenir du paiement mobile reste promis à un avenir radieux, malgré une certaine défiance dans le pays. « J’ai peur des problèmes de sécurité, de piratage de mon compte bancaire. Il y a des arnaques », admet Wang Xiaofeng. Le désamour des Chinois pour leur smartphone ne semble toujours pas entamé, même si Alipay et WeChat Pay commencent à rendre leurs services payants et à instaurer une limite aux transferts d’argent (130 euros pour WeChat et 2 700 euros pour Alipay), au-delà de laquelle les usagers devront payer une commission. Et de cette guerre numérique, on ignore encore si WeChat pourra en sortir vainqueur, sachant que le groupe a annoncé en septembre vouloir partager les données personnelles de ses utilisateurs avec le gouvernement chinois.

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LA CHINE TISSE LES FILS DE SES NOUVELLES ROUTES DE LA SOIE

Restaurer la route de la Soie. Tel est l’objectif souhaité par la Chine qui a organisé, les 14 et 15 mai, un premier Sommet consacré au projet « Belt and Road » ou OBOR (One Belt, One Road), réunissant à Pékin une centaine de représentants de pays. Lancée par le président chinois Xi Jingping à l’automne 2013, au moment de sa prise de pouvoir, cette initiative a pour objectif de ressusciter l’antique route de la Soie, un immense réseau de voies terrestres et maritimes, qui permettait jadis à l’Empire du Milieu de faire du commerce avec l’Europe via l’Asie centrale. La seconde puissance économique mondiale souhaite ainsi développer plus avant les activités commerciales et les relations entre l’Eurasie et l’Afrique par la construction ou la modernisation de l’ensemble des infrastructures d’énergie et de transport.

Un projet titanesque

L’entreprise se révèle titanesque. Plus de 68 pays comprenant 4,4 milliards d’habitants et représentant jusqu’à 40 % du PIB mondial sont en effet concernés. Par ailleurs, près de 1 000 milliards de dollars d’investissements sont déjà promis par des fonds asiatiques, tels que l’AIIB (Asian Infrastructure Investment Bank), pour financer des projets autoroutiers, ferroviaires, énergétiques et portuaires, dont la construction d’une ligne ferroviaire reliant Londres à l’est de la Chine ou d’une route maritime connectant l’Asie du Sud-Est à l’Afrique du Nord. La Chine a, quant à elle, mis à disposition 40 milliards de dollars de capital initial via son fonds souverain « Silk Road Fund », auxquels devrait s’ajouter un complément d’environ 15 milliards de dollars, comme l’a annoncé le président Xi lors du Sommet.

Des risques géopolitiques et économiques

Outre des contours qui restent encore à définir et des bénéfices des plus incertains, l’initiative présente également des risques. Selon un rapport publié le 10 avril 2017 par l’Académie chinoise des Sciences sociales (CASS) et l’agence de notation « China Bond rating », le développement de l’OBOR est notamment influencé par le contexte géopolitique. En effet, des troubles liés au terrorisme, à la corruption et aux mouvements indépendantistes constituent des menaces aux activités de l’OBOR. Par ailleurs, la réalisation du projet dépend de l’application des bonnes pratiques de gouvernance dans les pays traversés par les infrastructures de l’OBOR. Les experts de la CASS craignent enfin que les tendances protectionnistes aux États-Unis et en Europe ne touchent d’autres parties du monde et fragilisent l’ensemble du projet.

Dans son rapport de janvier 2017, l’agence de notation Fitch met, elle, en garde sur les risques éventuels du financement des projets de l’OBOR sur les banques chinoises. De plus, si elle reconnaît que ces derniers permettront d’améliorer et de moderniser les infrastructures dans les différents pays d’Asie impliqués dans l’OBOR grâce au financement et à l’expertise technique de la Chine, l’agence émet des réserves sur la capacité des entreprises chinoises à s’adapter et à opérer dans les pays concernés. Pour réduire ces risques, Fitch préconise une plus grande participation de l’UE dans l’initiative afin de rassurer la communauté internationale sur la logique commerciale des projets de l’OBOR.

Autant de réflexions que soulèveront Jean-Pierre Raffarin, ancien Premier ministre et représentant de la France au Sommet international sur les « nouvelles routes de la Soie » de Pékin, ainsi que plusieurs experts, lors d’une réunion de décryptage de l’OBOR, qui se déroulera le 12 juin 2017, de 8h30 à 10h30, dans les locaux du MEDEF à Paris.

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